23 Jan
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Les mêmes barres d’immeubles poussent de Dublin à Marseille. A l’heure où les promoteurs sont maîtres dans nos villes, l’uniformisation utile au formatage du consommateur parfait se ressent jusque dans l’habitat. Il s’agit bien de gommer toute référence culturelle, tout attachement au patrimoine. Grisés par l’argent facile et rapide, investisseurs et politiques voient d’un bon œil la ruée vers la folie immobilière. A Vannes, nous aurions pu désenclaver l’hôpital, le centre-ville et maintenir des administrations près du cœur de la ville lors de la reconstruction du quartier de la gare par une route pénétrante dès le quartier de Bilaire. Une gare multimodale aurait même pu voir le jour comme une sorte de « hub » entre les trains, les bus, les taxis… Vannes est passée à côté de son avenir car, semble-t-il, il valait mieux pour nos élus faciliter la vente de foncier aux promoteurs immobiliers puis à la masse de spéculateurs rendant inabordable l’accès à la propriété aux actifs bretons. Et nos élus ont fait fort car, plutôt que de taxer les résidences secondaires notamment, comme la loi le leur permet, ils ont demandé un allongement dans le temps du dispositif Pinel : ce qui donne la possibilité d’investir plus longtemps dans l’immobilier locatif en échange de faveurs fiscales. Bref, la politique du pire est mise ici en place. Tout est fait au détriment d’une ville vivante, aux activités diverses, une cité transgénérationnelle.

Quand l’immobilier va, rien ne va plus en réalité !

Les grues surplombent la ville un peu partout : ce sont autant de nouvelles affreuses barres d’immeubles édifiées en béton et à la va-vite. Le moindre terrain est utilisé pour ce faire et nous sommes contraints d’y loger ou d’aller voir ailleurs. L’anticipation des élus municipaux, opposition comprise, est nulle quant à l’aménagement urbain. Le néant ! Ils font détruire des maisons patrimoniales (l’exemple de la maison à pans de bois hébergeant le bar Le Kastell ; les maisons à pans de bois de Saint-Patern entièrement rasées dès les années 80) pour les remplacer par ces horribles structures en béton qui ne dureront pas dans le temps. Aucun plan d’aménagement logique, les constructions se font de manière désordonnée en dépit de leur dire pour se défendre. Tant que ça pousse et que du foncier est vendu, les impôts ne sont pas censés être augmentés et compenseront le pillage par Paris des recettes de la fiscalité bretonne. Car, Paris coûte cher et ne redistribue que des miettes. Certains maires comme à Grand-Champ s’abaissent à raser bois et collines pour rembourser des emprunts toxiques par la construction de grands lotissements palliatifs dortoirs et peu humains. Les élus dans les terres profitent de la manne des actifs condamnés à fuir le littoral pour pouvoir se loger décemment.

Les élus qui plaisent malheureusement à la majorité des votes exprimés ne calculent plus rien. Seul le profit les intéresse ; tout le pouvoir est délégué aux promoteurs immobiliers qui vont donner jusqu’aux noms de lieu. Le remplacement culturel est sans ambages dans la toponymie : les noms méditerranéens, anglais, italiens… viennent remplacer les noms de lieux bretons. Les voies de circulation devenues quasiment d’étroites allées de villégiatures pour franciliens en retraite en cité balnéaire ont remplacé les véritables voies d’accès que nous connaissions. Là encore, l’anticipation municipale est égale à zéro : des immeubles accueillant des centaines de résidents s’ajoutent sans calcul à la file indienne aux abords d’accès déjà saturés.

La rue Charcot, un concentré d’entente destructrice du couple promoteurs-élus

En 2008, le promoteur Nexity-Eprim Ouest faisait construire des immeubles au bout d’une impasse étroite. La résidence de 168 logements au nom très méditerranéen « les Hauts de » Bernus voyait le jour. Prise d’assaut sur plans par les investisseurs externes à la Bretagne, seuls quelques propriétaires habitant sur place se compteront sur les doigts de la main ; l’essentiel des logements étant voué à la spéculation immobilière destinée à l’investissement locatif ou aux résidences secondaires.

Très rapidement, des malfaçons sont signalées à Nexity – Eprim Ouest et leur allié FONCIA-SOGIV. Les résidents sont menés en bateau : l’immeuble se fissure, promoteurs et gestionnaires de syndic se renvoient la balle pour jouer la montre et attendre la fin de la garantie décennale. Elle vient d’arriver, Foncia met désormais le couteau sous la gorge aux propriétaires pour qu’ils payent la réparation de malfaçon signalée depuis l’inauguration des immeubles.

Côté circulation urbaine, un virage en épingle est ouvert dès le départ sur le côté du boulevard de la Résistance pour rendre à double sens une rue qui n’a pas été bâtie à cet effet. Plusieurs accidents se sont produits mais les élus font toujours la sourde oreille. Le Maire-Adjoint en charge de l’urbanisme et des affaires foncières s’est déplacé pour annoncer au syndic local qu’il n’envisagera pas de travaux avant la fin des constructions. Arrivent en 2017 la construction par le promoteur CEFIM d’un immeuble en U, au doux nom anglais d’Urban Parc, encore plus grand, ainsi que plusieurs petits bâtiments sur un espace extrêmement limité. C’est le début de l’enfer pour les riverains. Les poids-lourds sont garés de part et d’autre de la rue tandis que la circulation bat son plein :

- Le raccourci formé par cette rue ces dernières années est emprunté par tout les habitants du quartier de Kercado et génère un trafic inadapté pour cette voie : le trafic des camions pour la première tranche et la seconde tranche des travaux de construction des résidences ; le fait que la première n’étant pas terminée accroît encore les nuisances pour les riverains ;

- La rue Charcot qui ressemblait plus à une rue de villégiature balnéaire qu’à un accès à des résidences accueillant déjà plusieurs centaines de riverains est saturée à certaines heures. L’état de la voirie est déplorable et dangereux pour les véhicules. Des riverains ont signalé des pots d’échappement cassés et des roues endommagées par les trous dans la chaussée causés par l’incessant ballet des poids-lourds ;

- Les travaux ne sont pas signalés, aucune circulation alternée n’a été mise en place et personne n’y fait la circulation : le danger pour les automobilistes, cyclistes et piétons est permanent.

- Pour accéder à la rue Charcot et au restaurant universitaire (cantine centrale également), les lycéens de Saint-Joseph (Kergypt) sont nombreux à emprunter la rue privée Paul-Emile Victor, en marchant au milieu de la route.


Les élus municipaux n’ont pas anticipé la nécessité d’adapter l’aménagement urbain aux nouvelles constructions qu’ils ont encouragé. Les accès existants, les nuisances, le trafic n’ont pas été reconsidérés et n’ont pas fait l’objet d’études sérieuses. Dans cette affaire précise, ce n’est pas Vannes Golfe Habitat, leur juteux marché sur fond de bailleur social, siégeant dans cette rue, qui se penchera sur le sort des habitants des lieux puisqu’ils mettent eux-mêmes les retraités à la rue en toute impunité.

De nombreux conflits entre automobilistes apparaissent par ailleurs dans le secteur. L’incident majeur est à craindre.

Enfin, la cerise sur le gâteau pour les riverains : le chantier principal fait travailler des salariés le samedi et parfois très tard le soir. Les travailleurs n’y sont pour rien, vous savez comment ça se passe dans le bâtiment : au détriment des salaires, des conditions de travail, de la sécurité des salariés et de l’emploi local, les promoteurs immobiliers iront chercher la main-d’œuvre à travers le monde si nous n’acceptons plus ici l’inacceptable.

Voilà la politique urbaine du pire, c’est celle-là que nous devrions balayer pour le bien de chacun au quotidien et surtout l’avenir de tous.

Bertrand Deléon.

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